Accueil > Tunisie > Délégation FSM 2015 > Ici & Là bas

Ici & Là bas

Publié le vendredi 15 janvier 2016

Ici, il y a beaucoup de gens, normal, c’est une capitale.

Ici, ça bouge beaucoup qu’il soit 7 heures du matin comme 23 heures du soir.

Ici, en ce moment a lieu le forum social Mondial, beaucoup de personnes du monde entier, alors tu vois dans le regard des gens d’ici que c’est pas tout à fait leur quotidien, quoi que ..

Ici, on nous dit toujours « Bienvenue » qu’on soit dans la rue, dans un café ou dans un taxi. Toi tu souris doucement, les gentEs d’ici quand ilLEs viennent chez nous, on leur dit rarement bienvenue, car manifestement, les autorités disent qu’ilLEs ne sont pas les bienvenuEs.

Ici, je me sens bien, j’ai l’impression d’exister loin de mon quotidien.

Ici, au Forum Social Mondial, les gentEs bravent la pluie et le vent pour se retrouver, se rencontrer, organiser une lutte commune.

Ici, on se perd parmi plus de 1000 ateliers proposés, des plus politiques aux plus incongrus.

Ici, on se perd dans les méandres de l’université Al Manar, des ateliers annulés, d’autres introuvables. Alors tu te retrouve un peu au hasard dans un atelier, des fois c’est chouette, d’autres fois, un peu soporifique, faut l’avouer.

Ici, tu es étonné de la prépondérance de la langue française, on parle beaucoup français, la traduction est le plus souvent d’une langue vers le français, le contraire s’est peu observer. Alors tu te dis que tu n’as pas choisi les bons ateliers.

Mais ici, tu es étonné de la mobilisation des jeunes tunisienNEs, quelques milliers de jeunes volontaires ont travaillé ensemble pendant des mois pour la préparation et le bon déroulé du forum. Alors tu grognes un peu quand tu croises des espèces de vioks grincheux qui trouvent un malin plaisir à incendier les volontaires parce que, « oh les vilainEs volontaires, illEs ne savent même pas où se trouve ma salle d’ateliers. »

Ici, c’est rigolo, quand tu discutes avec les gentEs, tu te rends compte que même si nous sommes sur le même lieu, personne ne vit la FSM de la même manière, alors tu passes beaucoup de temps à discuter autour d’un café et d’une cigarette des impressions que l’on a de ce Forum Social Mondial.

Ici, tu es quand même déçu, tu te rends compte que les personnes que tu espérais croiser, les militantEs de terrain, celles & ceux qui luttent ne sont pas là. Tu n’as croisé que leurs représentantEs institutionnelLEs, des journalistes, des avocatEs et grosses ONG. Alors oui, c’était intéressant mais il manquait quelque chose.

Ici, sur le forum social mondial, les gens te parlent de solidarité internationale, c’est THE CONCEPT que tout le monde parle, mais moi je m’interroge sur le sens que ça a. Après tout, c’est une dénomination fourre-tout, chacunE met ce qu’ilLe veut dernière ça. Alors moi, ça m’embête d’entendre beaucoup de personnes chanter les louanges de quelque chose si flou. Moi ça me fait plus penser à comment les sociétés occidentales ont l’impression de faire leurs B.A en « aidant » ses pauvres pays du sud qui ont vraiment besoin de se développer. C’est encore et toujours conservé une barrière hiérarchique entre le Nord et le Sud. Alors oui, c’est bien beau de dire qu’un autre monde est possible, mais comment construire un nouveau monde, sans détruire tous les rapports établis par le monde actuel.

Ici, les jeunes parlent de politiques, chez nous, beaucoup moins.

Ici, il y a quatre an, il y a eu la révolution, c’est important ici, la révolution, tu vois des étoiles dans les yeux des jeunes quand ilLes t’en parlent.

Mais voilà, est-ce que cela a changé les choses, tu te le demandes, les avis sont mitigés, certains sont toujours pleins d’espoirs mais d’autres beaucoup moins.
On te dit qu’ici, la liberté d’expression s’arrête quand tu commences à critiquer les autorités. « Des personnes sont toujours envoyées en prison pour ce qu’ilLes pensent. » Un tunisien a dû fuir le pays pour un billet d’humeur critiquant le gouvernement en place écrit sur son blog.

Ici, alors tu penses à chez toi, au loi de surveillance de masse qui commencent à pointer le bout de son nez.

Ici, on te dit que c’est un peu comme chez nous, les riches sont de plus en plus riches et les pauvres sont de plus en plus pauvres.

Alors ici, cette révolution tant fantasmée commence à se transformer en cendre dans ta gorge.

Ici, j’ai une pensée à tous les peuples qui luttent.

M.

CEMEA Pays de la Loire - 15 bis allée du comandant Charcot - 44000 Nantes - 02 51 86 02 60 SPIP | réalisé et hébergé par les CEMÉA Pays de la Loire | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0