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UNE JEUNESSE A L’ENERGIE REMARQUABLE

Publié le mercredi 17 juin 2015

Cet article est paru dans le dossier spécial d’ AlterMondes FSM 2015

À Gafsa, les jeunes sont animés par une volonté de changement social. Ils cherchent à garantir leur liberté de pensée et à construire leurs propres modes d’action. Ils exercent ainsi leur sens des responsabilités en inventant des modes d’organisation qui n’existaient pas en Tunisie. À la découverte de deux associations singulières : AJA et Mashed.

par CATHERINE LIABASTRE, Conseillère d’éducation populaire et jeunesse à la DRJSCS Pays de la Loire

Photo Catherine Liabastre

« On a des idées mais à cause de l’instabilité politique on n’avance pas vite »

À 350 kilomètres de Tunis, dans la région de Gafsa, l’Association des jeunes agriculteurs (AJA) rassemble des jeunes, entre 20 et 30 ans, filles et garçons, diplômés dans différents domaines, qui ont en commun des racines agricoles. Leurs parents possèdent un lopin de terre, produisent une agriculture familiale, dont les produits sont, pour certains, commercialisés dans la région. Ils ont
également en commun le chômage et l’absence d’indépendance financière. Ils vivent tous chez leurs parents. C’est en 2012 qu’ils créent l’AJA. Déjà engagés de façon informelle dans l’ombre de l’ancien régime, ils cherchent à se professionnaliser dans le secteur agricole et le développement rural afin d’accompagner la création d’activités individuelles et collectives, liées à la terre. « Nous voulons encourager les jeunes à diversifier les activités et à s’investir dans l’agriculture agroécologique et le tourisme intégré », nous livre Anis Sendi, le président de l’association. L’AJA facilite ainsi les procédures administratives, accompagne les porteurs de projets dans les formations adaptées et s’engage auprès des jeunes femmes du monde rural, soucieuses de leur intégration active dans la vie sociale et citoyenne.

Surtout, ne pas décourager
L’énergie des jeunes de l’AJA est remarquable. Ils ont fort à faire dans cette région économiquement fragile, isolée des zones touristiques et dont les ressources sont encore à révéler. Ainsi, ils doivent valoriser et faire connaître les atouts du territoire au-delà de l’activité du bassin minier, participer au chantier de la démocratie participative, se faire reconnaître des responsables locaux et asseoir leur légitimité en tant que jeunes, résister à la récupération par des syndicats et des organisations politiques locales, faire front collectivement contre l’accaparement de leurs terres par les grosses entreprises, étrangères et nationales. « On ne veut pas devenir ouvrier sur nos propres terres ! », affirme Safwen Sendi, secrétaire général de l’AJA. Ils doivent également participer à des rassemblements nationaux autour de l’économie sociale et solidaire, des colloques sur l’avenir de l’agriculture, répondre aux demandes de jeunes des régions voisines (Kasserine et Sidi Bouzid), qui souhaitent s’organiser pour former de nouvelles AJA, continuer, ne pas se décourager… « On a des idées mais à cause de l’instabilité politique on n’avance pas vite », regrette Anis. Depuis 2013, l’association s’est aussi ouverte à la coopération internationale avec les acteurs des Pays de la Loire, s’enrichissant de l’action collective par delà les frontières en s’associant avec l’AFDI. Les jeunes y trouvent des forces et des ressources sans s’y soumettre, qu’ils offrent en retour à celles et ceux qui construisent avec eux des liens et des actions concertées.

Éveil du sens critique
Les jeunes de l’association Mashed œuvrent eux aussi au développement de l’expression citoyenne. Jeunes diplômés chômeurs ou étudiants, ils agissent à travers la création et l’éducation artistique et culturelle pour permettre l’éveil du sens critique et l’action collective émancipatrice. Ils veulent élargir leur capacité d’action et prendre leur place dans l’organisation de la cité. Ils organisent des projections débats, des ateliers d’arts plastiques, des expositions dans l’espace public. Ils interpellent, se forment, agissent auprès des enfants, s’engagent dans les démarches d’éducation populaire. Le café Down Town, leur quartier général, est le lieu privilégié des discussions, où l’information circule et se confrontent les idées. Dans le cadre de l’accord de coopération entre le Gouvernorat de Gafsa et la Région des Pays de la Loire, Mashed s’est engagée avec les CEMEA en accueillant des jeunes volontaires ligériens et en expérimentant à leur tour le volontariat, dans des associations de jeunesse de la région nantaise. Ainsi, les pratiques d’animation s’échangent solidairement et se renforcent mutuellement, ici et là bas. Mais de ces regards partagés, les jeunes français vont aussi gagner de nouvelles énergies dans leur propre rapport au politique au sein d’une démocratie vieillissante, où la participation des jeunes est à réinventer.

Photo Catherine Liabastre

http://fsm2015.altermondes.org/

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