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C’est normal ?

Publié le jeudi 21 janvier 2016

C’est quoi, une situation normale ? Une situation habituelle ? Est ce qu’on peut s’habituer à tout ? Est ce qu’on peut faire autrement ?

Ce matin, après un réveil difficile, N nous demande :
- "Vous pouvez écrire un article sur l’incursion de ce matin ?"

Un article ? Encore ? Mais pour dire quoi ?

« Ce matin, l’armée est encore entrée dans le camp. Elle a encore arrêté des gens. Elle en a encore blessé d’autres. Ils ont encore balancé trop de gaz lacrymo, au point que les gens ont maintenant du mal à respirer » ?

On compte sur nos doigts. 5 fois en 10 jours. Ca fait une incursion tous les 2 jours.

Rien n’a changé depuis 3 mois qu’on est ici.

Mais nos réactions ont changé.
Habitué.es, on ne l’est pas, personne ne peut l’être, ou personne ne devrait l’être. Mais ces incursions sont devenues une « normalité ».

Ce matin, vers 7h, je me suis surprise à dire, d’un ton banal, blasé, encore endormie : « Pffff, ils sont encore là ? Font chier à force. »

T. est monté sur le toit pour filmer, comme d’habitude.
Cette fois, les soldats l’ont vu, ils ont braqué leurs M16 sur lui.

Ils font comme ça, pour évacuer la rue quand ils arrivent. Ils braquent les gens, c’est normal . T a reculé doucement, alors pour le faire partir plus vite, ils lui ont lancé une grenade assourdissante (photo ci dessous).

Ils font comme ça, pour évacuer plus vite. Ils lancent des grenades assourdissantes sur les passants, sur les gens qui partent bosser. C’est normal.

Ils ont arrêté M. Et A.

M. était chez lui.

A. n’y était pas.
Alors, simplement, le capitaine l’a appelé sur son portable (« Mais ils ont son numéro ?? » « (rires) ils savent tout ! »).

Quelque chose comme « Alors A., t’es pas chez toi ? Je sais que t’es pas loin, tu devrais regarder devant ta maison »

Ils avaient sa mère, bien visible, comme un trophée.
Alors A. s’est rendu, dans le calme. Ils font comme ça quand ils veulent arrêter quelqu’un, c’est normal.

Au bout d’une heure, les soldats sont partis, comme d’habitude. Alors tout le monde a pu aller travailler, faire ses courses, amener les enfants à l’école, comme d’habitude.

Alors, un article ? Encore ? Oui ! Parce que cette incursion, comme toutes les autres, ne doivent jamais devenir « juste une de plus ». Il faut les compter, en parler, s’en souvenir. Parce que M. et A. ne sont pas « juste deux arrestations arbitraires de plus »

C et T

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